Voilà 40 ans que je n'avais pas grimpé en montagne. Thibault un compagnon de cordée artistique m'a proposé de porter un drapeau pour la paix au sommet du Pic des cinéastes dans le massif des écrins à 3200 mètres. Je monterai le drapeau blanc. Je reviens grimper en montagne non pour moi mais pour une cause. C'est essentiel pour moi d' être actif dans le monde. Lorsque je subis la vie je me noie dans mes larmes. L'ascension du pic fut un combat avec mes émotions qui remontaient du passé. Depuis mon adolescence, la montagne est associée au danger, j’y ai vu la mort arriver. Je grimpe avec précaution sur la montagne fragile, je m’élève et ma fragilité se révèle. La voie est impressionnante ; mes émotions me surplombent, je respire pour me calmer. Au relais, une mouche esseulée se laisse caresser. Des îles de fleurs se rencontrent dans les creux des failles du Gneiss. Des choucas nous reconnaissent. Un lichen vivace attire mon regard. Je partage au relais quelques impressions avec mes compagnons de cordées : Thibault et Théophile. Ils font attention à moi. Je suis bien assuré et rassuré. Au sommet de la première pointe je ne cherche pas à aller au prochain sommet encore plus haut. Je suis satisfait d’être arrivé. La redescente m'appelle, mais avant, je profite de ma situation altière pour planter un drapeau au sommet... Le drapeau de la paix flotte au-dessus de ma tête. Je n'attends plus rien du ciel. C'est dans mes profondeurs que je fais la paix avec mes émotions. Lors de la descente au refuge je suis dans un état entièrement consacré à la conservation de mon énergie corporelle. Plus je descends plus je ralenti. Je salue Thibault, nous avons fait la voie, nous sommes arrivées au sommet et nous sommes revenu vivants. Je prends le temps de redescendre dans le monde. Pic des Cinéastes©Thibault Cattelain |